(Bulletin de l’UFC Que Choisir N-C, Janvier 2010)
UN PROBLÈME TRÈS CONTRAIGNANT
Comme chacun sait, le lagon calédonien est classé par l’UNESCO au Patrimoine de l’Humanité depuis le 8 juillet 2008.
Dans son discours d’ouverture aux Assises de l’Eau en 2008, le Haut-Commissaire déclarait : « On a beaucoup entendu parler d’un certain grand tuyau, et à juste titre, mais il y a beaucoup de tuyaux qui déversent de l’eau dans le lagon et dont on parle un peu moins. Je pense que l’on pourrait en parler aussi.» (1)
On aurait pu penser, en effet, que les abonnés du Service de l’Assainissement collectif de la Ville de Nouméa paieraient au délégataire choisi par cette dernière une redevance pour ne pas polluer leurs baies. Eh bien non, c’est le contraire qui se produit !
Rappelons que Nouméa ne dispose actuellement que de 5 stations d’épuration : à l’Anse-Vata (équivalent 25 000 habitants), à Magenta (équivalent 4 000 habitants), à Rivière Salée (équivalent 8 500 habitants), à Yahoué (équivalent 5 000 habitants) et à Tindu-Kaméré (équivalent 4 700 habitants).
Soit au total environ 48 000 habitants raccordés à des stations d’épuration. Les eaux usées des autres usagers étant traitées par des fosses septiques ou les stations individuelles des grands ensembles immobiliers, puis rejetées dans la grande et la petite rade comme celles du Centre-ville, ou dans la mer comme celles de la Vallée des Colons collectées par un réseau unique (eaux pluviales et eaux usées).
Et la liste des quartiers polluant le lagon n’est malheureusement pas exhaustive…
UNE REELLE DISCRIMINATION
Certes, il est prévu la construction de 2 nouvelles stations d’épuration, au Centre-ville et au Faubourg Blanchot (4 milliards de francs)… mais il faudra attendre quelques années !
Malgré cette absence de raccordement, tous les abonnés paient la gestion du Service de l’Assainissement, créant ainsi une discrimination entre les usagers qui doivent vidanger leur fosse septique à leurs propres frais (environ 50 000 F) … et les autres.
A partir du moment où tous les usagers d’un service public ne sont pas placés dans une situation équivalente, ils ne devraient pas être traités de façon identique, notamment au niveau de la tarification : c’est le principe d’égalité des usagers devant le service public.
Mieux : pour financer la création de ces 2 nouvelles stations, on nous annonce la création d’un abonnement « assainissement » qui entrera en vigueur dès cette année, ainsi qu’une hausse du prix de la redevance assainissement, actuellement fixée à 53,76 F/m3… mais promise à 72 F/m3 en 2010, 80 F/m3 en 2011, 90 F/m3 en 2012, etc. (2)
Il faut savoir qu’en Métropole, lors de la création d’une station d’épuration, le prix du service d’assainissement augmente, certes, mais cette augmentation provient du paiement des intérêts d’emprunt, des amortissements et des charges d’exploitation liées au fonctionnement de la nouvelle station (3). Autrement dit, l’augmentation est répercutée sur la facture du consommateur lors de sa mise en service. Ce qui est normal !
A L’EXEMPLE DES USAGERS DE DUMBEA
C’est ce qui s’est passé pour le Grand Tuyau qui nous amène l’eau de Tontouta et que les abonnés financent intégralement. Les usagers n’ont pas payé de redevance avant la fin des travaux. Alors que pour les futures stations d’épuration du Centre-ville et du Faubourg Blanchot/Vallée des Colons, il va falloir payer, alors que les travaux n’ont pas encore débuté…
Et si les abonnés de Nouméa se regroupaient pour prendre enfin leur destin en main ?
Cette attitude permettrait, peut-être, d’accélérer la réalisation de ces stations d’épuration qui, actualité oblige, demandera plus de temps qu’un stade ou une piscine… Mais cela permettrait surtout de ne pas nous rendre complices de la pollution du lagon, tout en alimentant des caisses pour un service qui n’est pas rendu !
A cet égard, l’action récente menée par les abonnés de la Pointe à la Dorade (commune de Dumbéa) et couronnée de succès, a valeur d’exemple puisqu’ils ont obtenu :
• dans un premier temps, le remboursement de la redevance d’assainissement perçue depuis la souscription de leur contrat d’abonnement, ainsi que l’exonération de cette redevance jusqu’à la mise en service du réseau de refoulement de leur lotissement à la station d’épuration de Koutio ;
• dans un second temps, le raccordement de leur lotissement à cette même station d’épuration.
Ce que des Dumbéens ont obtenu, les Nouméens ne pourraient-ils pas l’obtenir ?
(1) Synthèse des Assises de l’eau 2008, page 5 (Discours d’introduction)
(2) La hausse programmée du prix de l’eau, d’après Les Nouvelles Calédoniennes
(3) L’économie des Services publics de l’Eau et de l’Assainissement (novembre 2008, page 26)