Le 26 juillet s’est tenu le 7° comité de gestion du Parc de la Mer de Corail sous la co-présidence de M. T. Lataste et de M. P. Germain, respectivement Haut-Commissaire de la république en Nouvelle-Calédonie et Président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
EPLP y a participé espérant que ses observations critiques seraient débattues (1) et les projets amendés.
Le Président Germain a tranché d’emblée: c’est LUI et lui seul qui fixe l’ordre du jour, la discussion est donc close.
Nous dénonçons cet autoritarisme déplacé mais, plus encore, totalement contreproductif pour la préservation du patrimoine naturel des Calédoniens (2)…
C’est ainsi qu’aucune réponse n’a été apportée aux nombreuses questions de fond que nous avons posées le 10 juin 2018 dans notre lettre ouverte, par exemple :
Quid des membres en conflits d’intérêt siégeant au comité (acteurs économiques) et participant aux décisions qui les concernent ?
Quid des études d’impacts (socio-économiques, et environnementaux) non réalisées ?
Quid du conseil scientifique pas encore désigné et donc pas consulté ?
Etc.
Ces inconnues pourtant de taille n’ont pas empêché le comité (sauf deux associations locales dont EPLP) de « dégager un consensus » (dixit sans rire M. Germain !) favorable à l’ouverture de Chesterfield Bellona au tourisme de croisière (3).
A l’appui de ces décisions nous a-t-on dit, les résultats de la consultation publique organisée du 28 juin au 12 juillet 2018.
Les Affaires Maritimes déroulent…
« 81 personnes y ont participé. 50 ont donné un avis favorable ».
Mais la lecture attentive des documents relatant cette consultation fait apparaître que sur ces 50 personnes favorables à la protection des Chesterfield-Bellona, 23 écrivent dans le même temps dans leurs commentaires que le niveau de protection proposé est insuffisant.
La comptabilité des Affaires Maritimes laisse donc largement à désirer…
Récapitulons : 27 avis vraiment favorables et 53 donc défavorables aux mesures proposées par le gouvernement...
Ajoutons à cela les 4 400 signatures de la pétition lancée par EPLP « Dites non au tourisme de croisière aux Chesterfield ! ».
Lorsque nous avons demandé si cette forte opposition avait été prise en compte, que croyez-vous qu’il advint ????
Eh bien M. Germain a évacué ces objections d’un revers de main. La pétition n’a pas de valeur, elle ne compte pas. Bref, les personnes qui l’ont signée sont renvoyées avec nous à leur statut de « sans dents »…
Aveuglement et mépris font un dangereux cocktail…
Donc consultation et pétition n’ayant pas conduit à des amendements de fond, la « réserve naturelle des Chesterfield-Bellona » sera bel et bien ouverte au tourisme de croisière.
Nous avons pensé utile de réitérer notre position: le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie (et l’Etat avec lui qui « laisse faire »…) commet une grave erreur d’appréciation en ouvrant ces zones de biodiversité rare et précieuse à des activités économiques (de surcroît bien peu rémunératrices) et ce, alors même que les Calédoniens y sont majoritairement opposés.
Le « Big boss » a dit rageusement que l’avis d’EPLP était connu de tous (et même au-delà de cette assemblée ! Gênerait-on ?) et que ces mesures étaient bienvenues puisqu’elles amélioraient la protection des sites chers à nos cœurs. Alors de quoi nous plaignons-nous ?! Décidément, nous sommes indécrottables !
Nous avons rétorqué que le sujet n’était pas là puisque nous tous autour de la table, avions accepté de siéger dans ce comité pour ce faire. La question que le comité a à trancher est celle-ci : les mesures de protection adoptées sont-elles suffisantes au regard des enjeux de conservation et sont-elles scientifiquement étayées ? Au vu des informations dont nous disposons et que nous avons transmises au comité, ce n’est pas le cas.
Il a dit aussi que cette ouverture à la croisière était « exploratoire » et que le niveau de protection pourrait être élevé ultérieurement au besoin. Ah bon, mais quand ? Après que des dégâts potentiellement irréversibles se seront produits (4) ? Nous avons conclu que la logique à l’œuvre n’est, à l’évidence, pas la bonne…
Ce comité a traité aussi de la mise en place du comité scientifique attaché au Parc. Près de 80 experts ont été pressentis et 12 ont été choisis. Choisis EXCLUSIVEMENT par ces messieurs représentants des administrations locales et d’Etat, et autre CRESICA (consortium recherche NC). EPLP a donc demandé que soient communiqués aux membres du Comité de gestion les CV, lettres d’intention et déclarations de non-conflit d’intérêt des impétrants. La réponse alambiquée apportée n’étant absolument pas satisfaisante, la représentante d’EPLP a insisté sur l’importance d’obtenir ces déclarations attestant de l’indépendance des chercheurs.
Mal lui en a pris !!!! Cela a en effet déclenché une grosse ire du « Chef » qui, vociférant, est devenu tout rouge. Violence verbale dégradante pour son auteur...
Cette réunion a démontré que, pour la Nouvelle-Calédonie et la France, seules comptent les apparences.
En matière d’environnement, on cherche vainement compétences et convictions chez ceux qui nous gouvernent...
Pour EPLP, la Présidente, Martine Cornaille
(1) voir notre lettre ouverte du 10 juin 2018
(2) rappelons que nous avons proposé par écrit au gouvernement un débat public destiné à éclairer les Calédoniens. M. Metzdorf n’a pas donné suite…
(3) nous relevons tristement que la SCO (société calédonienne d’ornithologie) et les représentants locaux des « grandes ONG » que sont Conservation International CI, PEW Charitable Trust et WWF, se sont déclarés favorables aux propositions gouvernementales. Incompréhensible sauf à considérer là encore quelques conflits d’intérêt… Il est vrai que le WWF participe au cluster maritime de NC (alors il ne faut pas fâcher les entrepreneurs pourvoyeurs de fonds !) et que WWF et PEW ont signé en catimini une « convention » relative au Parc avec le gouvernement de la NC avant même sa création par arrêté. Que prévoit-elle ? Mystère… Nous attendons sa communication...
(4) Rien n’est gravé dans le marbre et sera-t-il encore aux manettes lorsque le temps sera venu ????