Articles - Pesticides

Pesticides agricoles : un mauvais coup se prepare

Pesticides 2 Ajouter un commentaire
0 Note
Pesticides agricoles : un mauvais coup se prepare

Un article paru dans Le Chien Bleu ce mois ci, n'hésitez pas à l'acheter.

Cette affaire abracadabrante illustre comment nos institutions peuvent déraper.

Pendant des années le SIVAP, service de la Davar ( Direction des Affaires rurales)  a fort mal géré les homologations des pesticides agricoles, en respectant mal les procédures légales ( quorum de 50% en Comité Consultatif,échéances de renouvellement,…) et surtout le principe de précaution. Des molécules retirées du marché européen vu leur toxicité excessive étaient autorisées en Nouvelle-Calédonie : on préférait s’aligner sur l’Australie - très en retard dans ce domaine, et où les conditions de mise en culture sont différentesdes locales.

Les associations EPLP (environnement) et UFC Que Choisir (consommation) ont donné l’alerte en 2007 ;puis, comme la situation n’évoluait pas, elles ont agi en justice .. et gagné plusieurs recours. Au lieu de se mettre aux normes, la Davar a fait de la résistance. Pour se disculper de leurs négligences, les techniciens ont convaincu leurs responsables politiques successifsque tout le mal venait de la vétusté des textes – et non de leur mauvaise application. Bien sûr il fallait quelques aménagements : par exemple, rééquilibrer la composition du Comité consulta- tif vers la protection de la santé et de l’environnement. Beau prétexte… Les ateliers de discussion initiés en 2009pour revoir la réglementation ont été très vite interrompus par la Davar ; laquelle, après un simulacre de consultation, a imposé un projetde délibération « usine à gaz-écran de fumée » qui bouleverse TOUS les textes actuels, avec des innovations délirantes.

La plus grave : désormais les avis des services de santé et d’environnement ne seraient plus PUBLICS ; et les associations devraient donner leur avis sur les autorisations AVANT que les services cités ci dessus aient instruit les dossiers. On croit rêver.

La procédure de consultation prévue serait donc gravement viciée, vidée de son sens.

Il y a d’autres objections à faire. Mais comment les faire entendre ?

Ce texte est si fumeux, si complexe que tout décideur (au gouvernement ou au Congrès) a le plus grand mal à en avoir une vision claire. Sur ce projet déjà très avancé,  qui pourrafaire remarquer sa démesure, ses mauvaises réponses aux problématiques en jeu ?

Des officiels, repris par les media, ont évoqué une CONCERTATION. C’est FAUX !

Ce texte a été rédigé par ceux-là mêmes qui ont fait sanctionner plusieurs fois le gouvernement par la Justice, sur des décisions graves pour notre santé ou nos écosystèmes.

Ce texte a été envoyé « pour avis » aux 17 membres du Comité Consultatif,mais aucun d’eux n’en a débattu ouvertement ! Quelle transparence…

Des techniciens en désaccord avec des dispositions ont été tenus au devoir de réserve.

Les associations ont, elles, émis publiquement leurs critiques : ni réponse, ni prise en compte. Elles ont demandé en vain audience aux membres du gouvernement (Agriculture etSanté ). Et maintenant ? Elaboré de façon inacceptable, ce projet est trop lourd pour être discuté ou aménagé par nos élus.Il y a donc de grands risques qu’il soit adopté tel quel. D’ailleurs le Conseil Economique et Social, saisi du dossier, vient d’émettre à l'unanimité un avis réservé (et non pas défavorable) ; c’est le signe d’un embarras collectif. Mais paradoxalement celasemble avoir réjoui le représentant du gouvernement, qui pourra le faire passer quand même, après des aménagements de pure forme.

Il est hélas probable qu’il en ira de même au Congrès, placé devant un difficile dilemme, aux conséquences redoutables.

Didier Gasse