« On est resté à l’écart du protocole de Kyoto »
Professeur de sciences de la nature, et présidente d’Ensemble pour la planète, Martine Cornaille estime que non seulement les grands choix de développement du pays ne prennent pas en compte correctement l’environnement, mais qu’ils privilégient le plus souvent l’option la plus polluante.
Les Nouvelles calédoniennes : Comment voyez-vous l’avenir environnemental de la Calédonie ?
Sombre. Quand ils seront opérationnels, les grands projets métallurgiques vont aboutir à un triplement de nos émissions de carbone. Pendant que le monde entier se préoccupe de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la Calédonie fait exactement l’inverse. Pour des raisons économiques, on fait le choix de construire des centrales à charbon. C’est le combustible qui émet le plus de gaz carbonique, loin devant le fioul, très loin devant le gaz naturel. Et l’on ne préoccupe toujours pas sérieusement des énergies renouvelables.
[singlepic=85,320,240,,left]Tout de même, ce ne sont pas des éoliennes qui peuvent suffire à produire l’électricité nécessaire à ces usines ?
En matière d’énergies renouvelables, il y a plusieurs voies à explorer. L’éolien bien sûr, mais aussi l’électricité photovoltaïque. La Calédonie est un pays de soleil. Elle possède aussi un potentiel géothermique. En explorant toutes les possibilités, en s’en donnant les moyens, on pourrait notablement réduire les pollutions existantes et futures. Au lieu de quoi on est resté frileusement à l’écart du protocole de Kyoto au nom d’une sorte d’exception calédonienne. Mais à ce compte-là, chaque pays pourrait revendiquer sa propre exception, et polluer toujours plus !
Le président du gouvernement a pourtant évoqué un plan de réduction et de compensation des émissions carbonées.
Oui, et dans le même temps le député Gaël Yanno a répété qu’un projet de tramway pour le Grand Nouméa lui paraissait irréalisable parce que trop cher. En l’occurrence 30 ou 40 milliards. À comparer aux 170 milliards offerts ces cinq dernières années en défiscalisation pour les projets industriels. Donc la pollution automobile va continuer d’augmenter. Il y a de l’argent pour augmenter la pollution, mais pas pour la réduire.
Vous dénoncez également les carences en matière d’assainissement.
Malgré les travaux de ces dernières années en matière d’épuration, Nouméa reste une source majeure de pollution du lagon. On peut considérer que seulement 30 % des eaux domestiques et industrielles rejetées en mer sont propres. Et à marée basse, on commence à constater ici et là, comme en Bretagne, l’apparition d’algues vertes qui consomment l’oxygène nécessaire à la faune marine.
[singlepic=95,320,240,,left]Et qu’en est-il selon vous de la gestion des déchets ?
On est au Moyen Age. Ou presque. Le tri sélectif est presque inexistant, le recyclage aussi. Le maire de Nouméa a récemment déclaré qu’il fallait attendre. Or, tant que la capitale ne s’y mettra pas, personne ne suivra car la taille critique pour rentabiliser des installations de retraitement ne sera pas atteinte.